samedi 29 février 2020

Jataka - histoire de la chèvre et du sacrificateur

Extrait de "Little Buddha", film de Bernardo Bertolucci, 1993. 
Extrait tiré du conte des Jataka intitulé "Matakabhatta-jataka", relatant les vies antérieures du Bouddha. 

Jataka Vies antérieurs du Bouddha Shakyamouni

Enseignements de Sa Sainteté le Dalaï-Lama sur les épisodes des vies antérieures et Ode au Bouddha pour avoir enseigné l'interdépendance conférés le 2 mars 2018 à Dharamsala en Inde à l'occasion du jour des miracles (première pleine lune du calendrier tibétain).



Les Jatakas

Histoire du Bouddhisme" par Olivier Germain-Thomas, 
une série 15 émissions diffusées en 2007 sur France Culture, 
en partenariat avec Le Monde des Religions. https://www.franceculture.fr



Les Jatakas - le grand cerf d'or

Emission Sagesses bouddhistes de décembre 2017

Les Jatakas : des histoires qui retracent dans une grande originalité les vies passées du Bouddha. Enrichis d’images de l’Inde ancienne à la végétation luxuriante, mêlant sur une note presque féérique, animaux et pierres magiques, ces récits des vies antérieures de Bouddha sont également source d’enseignements sur l’Eveil, la réincarnation et le karma. Certaines sont pour les enfants et d’autres pour les adultes.

Mönlam 2020

Depuis le 3ème jour du 1er mois lunaire, les bouddhistes tibétains et apparentés célèbrent le Mönlam སྨོན་ལམ་ཆེན་མོ་, littéralement "la Grande Prière", qui va se terminer en apothéose le 15ème jour avec la "grande fête des miracles" ཆོ་འཕྲུལ་དུས་ཆེན.
Cette année, cela coïncide avec la période du 26 février au 9 mars inclus.  


Cette période commémore les joutes en pouvoirs supranormaux, qui opposèrent autrefois à Shravasti le Bouddha Shakyamouni et six grands Maîtres hindouistes, et dont le Bouddha sortit vainqueur. 


Depuis son instauration à Lhasa par Jé Tsongkhapa en 1409, le Mönlam est l'une des plus grandes fêtes tibétaines. Jusqu'à l'invasion du Tibet, la seule interruption avait duré vingt ans, au début du  XVIème siècle, par décret pris par les dirigeants Tsangpa karma-kagyu.


Traditionnellement, c'était durant le Mönlam placé sous la présidence du Ganden Tripa (le chef suprême de l'école gelugpa) que se déroulaient les examens finaux des geshe lharampa, le titre le plus prestigieux chez les érudits gelugpa.
Par ailleurs, Ganden Tripa exposait chaque jour des Jataka : épisodes des vies antérieures du Bouddha Shakyamouni, alors qu'il était encore bodhisattva et s'entraînait aux six paramitas, la générosité, l'éthique, la patience, l'enthousiasme, la concentration et la sagesse.

vendredi 28 février 2020

Secrets de beauté


Selon le bouddhisme, la cause principale de "la beauté" (au sens d'aspect attrayant) est la patience.

 Audrey Hepburn (1929-1993) aurait décrit ses secrets de beauté de la manière suivante :

Pour avoir des lèvres attirantes, prononcez des paroles de bonté.
Pour avoir de beaux yeux, regardez ce que les gens ont de beau en eux.
Pour rester mince, partagez vos repas avec ceux qui ont faim.
Pour avoir de beaux cheveux, laissez un enfant y passer sa main chaque jour.
Pour avoir un beau maintien, marchez en sachant que vous n’êtes jamais seule, car ceux qui vous aiment et vous ont aimé vous accompagnent.
Les gens, plus encore que les objets, ont besoin d’être réparés, bichonnés, ravivés, réclamés et sauvés : ne rejetez jamais personne.
Pensez-y : si un jour vous avez besoin d’une main secourable, vous en trouverez une au bout de chacun de vos bras.
En vieillissant, vous vous rendrez compte que vous avez deux mains, l’une pour vous aider vous-même, l’autre pour aider ceux qui en ont besoin.
La beauté d’une femme n’est pas dans les vêtements qu’elle porte, son visage ou sa façon d’arranger ses cheveux. La beauté d’une femme se voit dans ses yeux, car c’est la porte ouverte sur son cœur, la source de son amour.
La beauté d’une femme n’est pas dans son maquillage, mais dans la vraie beauté de son âme. C’est la tendresse qu’elle donne, l’amour, la passion qu’elle exprime.
La beauté d’une femme se développe avec les années.

lundi 24 février 2020

Losar

 

Meilleurs vœux 

Paix, Santé et Sérénité


vendredi 21 février 2020

De la solitude

... Une autre pratique de bodhisattva consiste à demeurer dans la solitude. Pourquoi ? Premièrement, en résidant dans la solitude, on s'écarte des objets nocifs, d'où un affaiblissement  des facteurs perturbateurs. Deuxièmement, dans la solitude, il y a nettement moins d'occasions d'être distrait, ce qui favorise l'épanouissement des conduites et pensées vertueuses, bénéfiques. Troisièmement, dans la solitude, on peut aiguiser une intelligence, un esprit plus limpide, et ainsi une plus grande acuité qui permet de mieux pénétrer le Dharma, d'en acquérir une meilleure compréhension et par là même, des convictions mieux fondées. Pour pratiquer, il est donc recommandé de rechercher la solitude. Or, nous, nous faisons exactement le contraire. Quand nous n'avons pas d'amis ou de relations, nous sommes angoissés, inquiets, et nous nous ingénions à trouver de nouvelles connaissances. Les bodhisattvas font l'inverse. Ils sont enclins à fuir la compagnie et à chercher la solitude. ...

En fait, quand on parle de solitude, il faut savoir qu'il y en a de deux sortes : la solitude géographique et la solitude mentale. La première, c'est évident : il s'agit de se trouver dans un endroit écarté, isolé, loin des autres. Mais pour ce qui est de la solitude mentale, c'est tout à fait différent. On peut parfaitement être au milieu des autres et cultiver quand même la solitude mentale. Il y a solitude mentale lorsqu'on arrive à écarter les pensées inutiles - rêvasseries, superstitions et autres. Si on réussit à instaurer en soi la solitude mentale, on a alors acquis la véritable solitude, et dès lors on peut très bien rester dans la foule ; ça ne risque plus nuire.
(Extrait Enseignement de Genlags - 1990)

Étude, réflexion et méditation

Étude, réflexion et méditation, il faut les trois. Il faut commencer par l'étude, mais il ne faut surtout pas dissocier la réflexion de l'étude, c'est-à-dire que, dès que nous avons étudié un sujet, il faut immédiatement y réfléchir, et dès que nous y avons réfléchi, il faut sans attendre méditer ce point. Il faut pratiquer de manière progressive les trois approches à propos d'un même  sujet, mais il ne faut pas les séparer pour autant. Il ne faut pas croire qu'on va étudier un sujet, réfléchir à un autre et méditer un troisième. L'étude est fondamentale et dans les soutras, on la compare à la lampe, à la lumière qui éclaire. L'étude est également la meilleure des possessions car c'est une possession qui ne peut pas nous être dérobée. N'importe quoi d'autre que nous puissions obtenir, des voleurs ou brigands pourraient s'en emparer, nous l'arracher, mais l'étude, une fois que nous l'avons, nous pouvons la conserver.
Je peux en attester. J'en ai fait l'expérience... Lorsque j'ai quitté le Tibet pour gagner l'Inde, tout ce que j'ai pu emporter, c'était mon corps et mes connaissances. Tout le reste, il a fallu le laisser derrière moi. Les possessions, la famille, les parents, les amis. 
(Extrait d'un Enseignement de Genlags - 1990)

jeudi 20 février 2020

RIP Graeme Allwright Petites boîtes

Bon résumé du samsara.




Petites boîtes très étroites
Petites boîtes faites en ticky-tacky
Petites boîtes, petites boîtes
Petites boîtes toutes pareilles.
Y a des rouges, des violettes
Et des vertes très coquettes
Elles sont toutes faites en ticky-tacky
Elles sont toutes toutes pareilles.
Et ces gens-là dans leurs boîtes
Vont tous à l'université
On les met tous dans des boîtes
Petites boîtes toutes pareilles.
Y a des médecins, des dentistes
Des hommes d'affaires et des avocats
Ils sont tous tous faits de ticky-tacky
Ils sont tous tous tous pareils.
Et ils boivent sec des martinis
Jouent au golf toute l'après-midi
Puis ils font des jolis enfants
Qui vont tous tous à l'école.

Ces enfants partent en vacances
Puis s'en vont à l'université
On les met tous dans des boîtes
Et ils sortent tous pareils.
Les garçons font du commerce
Et deviennent pères de famille
Ils bâtissent des nouvelles boîtes
Petites boîtes toutes pareilles.
Puis ils règlent toutes leurs affaires
Et s'en vont dans des cimetières
Dans des boîtes faites en ticky-tacky
Qui sont toutes toutes pareilles.

De mal en pis

Une petite histoire (racontable) d'Akou Tönpa, littéralement "Oncle Guide".

"Alors, l'Oncle, ça s'est passé comment ?
- Eh bien, au début, c'était vraiment pas terrible !
- Ah bon ! Et après ?
- Après ? Ca a été de mal en pis".

Bonne description du samsara, non ?


lundi 17 février 2020

De la compassion à l'Éveil



Si vous êtes décidé à obtenir l'excellent Éveil et les états d'existence supérieurs, 
ayant pris les Trois Joyaux pour refuge, 
en premier lieu étendez votre compassion à tous.

Atisha
 (Bodhisattvacarya sutri krita pabara)

vendredi 14 février 2020

Saint-Valentin : célébration de l'amour ou de l'attachement ?

14 février, jour faste pour les fleuristes. Je m'en réjouis pour eux, en tout cas pour les victimes collatérales des grèves en danger de dépôt de bilan.

Eh oui, le moindre acte de l'un peut avoir des effets sur la vie de l'autre.
Cf. le battement d'aile du papillon.
Cf. Atisha soulignant que, pour pouvoir vraiment aider autrui, il faut au moins réaliser la clairvoyance, dans l'attente de l'omniscience.

Fi des digressions. Venons-en au plat du jour, l'attachement et l'amour.
Je ne reviendrai pas sur les origines de la tradition de la Saint-Valentin. Trop compliqué, et pas le sujet, qui est une petite méditation analytique à propos des deux phénomènes conventionnels, ou encore nominaux, que sont l'attachement et l'amour.

Pour rappel, si on en croit les philosophes madhyamika prasangika, rien de ce qui existe n'existe en soi. Tout existant présente deux niveaux, ou encore deux modes, d'existence :
un niveau ultime : le fait d'être vide de réalité autosuffisante,
un niveau conventionnel : le fait d'être une convention, établie en dépendance de son mode d'être ultime ainsi que de divers existants (pas n'importe lesquels néanmoins) tout autant conventionnels.

Comment comprendre que l'attachement et l'amour sont de simples phénomènes nominaux ?

1) Un premier point à noter est le fait qu'il s'avère indispensable de tout d'abord s'entendre sur des définitions. Sinon, on va discuter des heures durant sur la base de malentendus. D'où des dialogues de sourds, comme on dit, si fréquent en ce bas monde.
Rappelons donc que, dans le cadre du bouddhisme, par convention,

     * on appelle amour l'attitude mentale consistant à souhaiter le bien et le bonheur de l'objet concerné (toujours des êtres animés), de manière désintéressée, sans rien attendre en retour.
Exemples : l'amour maternel, l'amour du Bouddha ou de Jésus envers les êtres, etc.
Effets entraînés : bonheur et sérénité

     * on appelle attachement l'attitude mentale consistant à convoiter l'objet concerné (êtres animés ou objets inanimés) et à le vouloir pour soi, pour son propre plaisir.
Exemples : attachement pour un partenaire ; pour un rang ou un poste ; pour une voiture, une coiffure, etc. ; pour sa réputation et son image.
Effets entraînés :
                    - dans l'immédiat : apparent plaisir mais dénué de calme, plutôt associé à de l'inquiétude (+ jalousie, avarice, orgueil, etc.) ;
                     - à court et long termes : souffrances

2) Un autre indice que l'attachement et l'amour sont de simples phénomènes nominaux : ils sont variables, et ils dépendent de toutes sortes de facteurs, dont les objets pris en compte ou encore la manière d'envisager ces objets.

* Les faits divers démontrent que l'amour maternel n'est pas une réalité absolue.
Si l'amour maternel était autosubstantiel, toute mère l'éprouverait de manière inhérente, et sans exception. Les trop nombreux infanticides nous prouvent que ce n'est pas le cas !

* De même, l'attachement, s'il était autosubstantiel, dans la mesure où il existe en notre esprit, nous devrions l'éprouver dès la conception jusqu'à la mort, sans un instant de répit. Il devrait d'ailleurs se manifester continuellement, quels que soient les objets entrant dans notre champ de perception.
Or, ce n'est pas non plus le cas. Heureusement pour nous. Nous pouvons en remercier notre mode d'être ultime.

Plus prosaïquement, il est flagrant que la manifestation de l'attachement en notre esprit est tributaire de nombreux éléments. Comme vous connaissez sans doute les conditions énumérées par Vasubandhu et Asanga, je ne vais pas les répéter ici.
Au quotidien, nous avons tous pu faire l'expérience qu'un mets qui nous semble appétissant quand nous sommes en pleine forme, peut nous donner la nausée quand nous sommes malades. Nos goûts, c'est-à-dire nos attachements, alimentaires varient sensiblement au fil des années. Bébés, nous trépignons d'impatience à la vue du biberon ou de la bouillie, et quelques mois ou années plus tard, nous refusons  catégoriquement d'avaler ça. Enfants, nous recrachons les épinards ou les lentilles, dont nous raffolons (peut-être) à l'âge dit adulte, etc., etc.

Un autre exemple, qu'il serait inexcusable de ne pas citer aujourd'hui : vis-à-vis d'une seule et même personne, ne nous arrive-t-il pas de passer de "l'amour fou", c'est-à-dire de l'attachement exacerbé, à l'indifférence, et parfois à l'aversion ?

Il peut aussi nous arriver de glisser de l'amour authentique, par exemple l'amour maternel, à l'attachement : volonté (qui peut être inconsciente)  de garder son enfant pour soi, de se réaliser au travers de lui, etc.
L'inverse est heureusement vrai : nous pourrions passer de l'attachement à l'amour.

Attention ! Il ne s'agit pas de transmuer l'attachement en amour, mais de remplacer l'attachement par l'amour.
Autrement dit, il faut éliminer l'un pour laisser la place à l'autre.

Pour ce faire, des méthodes existent.
Il faut et il suffit d'étudier les Enseignements du Bouddha et de les appliquer. Il faut faire les deux. Comme dans l'exemple de l'oiseau qui a besoin de ses deux ailes pour voler.
La seule connaissance intellectuelle, pour importante qu'elle soit, ne suffit pas.





jeudi 13 février 2020

Petites causes, grands effets

Le Bouddha et les Maîtres qui lui ont succédé depuis 25 ou 26 siècles recommandent constamment de ne pas négliger la puissance de ce que nous faisons,  sur les trois plans : physique, oral et encore plus mental.

C'est que d'une cause - bonne ou mauvaise - apparemment infime peut s'ensuivre un résultat gigantesque, qui sera bon ou mauvais en concordance avec la cause.
Sur le plan matériel, un exemple traditionnel est celui du minuscule pépin de pomme, susceptible de générer un grand pommier, susceptible de donner des récoltes de pommes de longues années durant.

Les événements aussi peuvent s'enchaîner, comme dans cet exemple attribué à Benjamin Franklin (1706-1790) :
 

À cause du clou, le fer fut perdu.
À cause du fer, le cheval fut perdu.
À cause du cheval, le cavalier fut perdu.
À cause du cavalier, le message fut perdu.
À cause du message, la bataille fut perdue.
À cause de la bataille, la guerre fut perdue.
À cause de la guerre, la liberté fut perdue.
Tout cela pour un simple clou...  



Dans un registre plus réconfortant, il suffit de nous reporter aux soutras et grands traités bouddhistes, pour y trouver maints récits mentionnant tel petit don ou autre acte positif, apparemment insignifiant, parfois machinal, qui permit plus tard à son auteur de rencontrer le Bouddha/le Maître et le Dharma, de s'engager sur la voie menant à l'éveil et de la parcourir jusqu'au terme. 

Deux exemples parmi tant d'autres :
- Ce vieil homme qui put être admis dans la communauté monastique, grâce à des mérites acquis bien longtemps auparavant, lorsque l'insecte qu'il était alors fut entraîné autour d'un stupa par une averse. Devenu moine, ce qui le sauva d'un suicide par désespoir, le vieil homme finit par comprendre la vacuité et obtint rien moins que la libération du samsara.
- Le pandit Sthiramati, l'un des principaux disciples de Vasubandhu, dont il est dit qu'il surpassa son maître en Abhidharma. La raison avancée est que dans sa vie précédente il fut un pigeon qui nichait dans la frondaison d'un arbre sous lequel Vasubandhu s'était assis et avait récité L'Abhidharma...
 


L'essence de l'enseignement

J'ai trouvé cette jolie histoire je ne sais plus trop où sur Internet.
Qu'elle soit vraie ou pas, peu l'importe. J'aime sa conclusion
Elle correspond à ce que j'ai bien souvent constaté dans la manière de faire de mes Maîtres bouddhistes.Il peut leur arriver de se montrer sévères, voire "durs", mais jamais, jamais, ils ne sont humiliants.


Un vieil homme rencontre un jeune homme qui demande :
"Vous souvenez-vous de moi ?  
Et le vieil homme dit NON.
Puis le jeune homme lui dit qu'il était son élève.
Et l'enseignant demande:
- Que fais-tu, que fais-tu dans la vie?
Le jeune homme répond:
- Eh bien, je suis devenu professeur.
- Ah, comme c'est bon, comme moi ? dit le vieil homme.
- Eh bien oui. En fait, je suis devenu professeur parce que vous m'avez inspiré à être comme vous."

Le vieil homme, curieux, demande au jeune homme à quel moment il l'avait décidé à devenir professeur.
Et le jeune homme lui raconte l'histoire suivante:
"Un jour, un de mes amis, également étudiant, est arrivé avec une belle montre neuve, et j'ai décidé que je la voulais et je l'ai volée. Je l'ai sortie de sa poche.
Peu de temps après, mon ami a remarqué le vol et s'est immédiatement plaint à notre professeur, qui était vous. Ensuite, vous êtes allé en classe et vous avez dit :
- La montre de cet étudiant a été volée pendant les cours aujourd'hui.
Celui qui l'a volée, veuillez la rendre."
Je ne l'ai pas rendue parce que je ne voulais pas le faire.
Ensuite, vous avez fermé la porte et nous avez dit à tous de nous lever et qu'il allait un par un fouiller nos poches jusqu'à ce que la montre soit trouvée.
Mais vous nous avez dit de fermer les yeux, car vous ne la chercheriez que si nous avions tous les yeux fermés.
Alors nous l'avons fait, et vous êtes allé de poche en poche, et quand vous avez fouillé ma poche, vous avez trouvé la montre et l'avez prise.
Vous avez continué à fouiller les poches de tout le monde, et quand vous avez eu fini, vous avez dit :
"Ouvrez les yeux. Nous avons la montre."
Vous ne m'avez rien dit et vous n'avez jamais mentionné l'épisode.
Vous n'avez jamais dit non plus qui avait volé la montre.
Ce jour-là, vous avez sauvé ma dignité pour toujours.
Ce fut le jour le plus honteux de ma vie.
Mais c'est aussi le jour où ma dignité a été sauvée de ne pas devenir un voleur, une mauvaise personne, etc. Vous ne m'avez jamais rien dit, et même si vous ne m'avez pas grondé ni donné une leçon de morale, j'ai reçu le message clairement.
Et grâce à vous, j'ai compris ce qu'un vrai éducateur doit faire.
Vous souvenez-vous de cet épisode, professeur?
Et le professeur répond :
"Je me souviens de la situation, de la montre volée, que je cherchais chez tout le monde, mais je ne me souvenais pas de toi, car j'ai aussi fermé les yeux en cherchant."

C'est l'essence même de l'enseignement :
Si pour corriger, vous devez humilier, vous ne savez pas enseigner.



mercredi 12 février 2020

Les deux vérités, conventionnelle et ultime

ཀུན་རྫོབ་བདེན་པ་ saṃvṛti-satya -  དོན་དམ་བདེན་པ  paramārtha-satya


Par définition, les deux vérités ne concernent que ce qui existe.
D’où le terme བདེན་པ satya : « vérité », ou encore « réalité ».
Cela exclut ce qui n’existe pas du tout, ni de manière ultime, ni de manière conventionnelle.

Sur ce point, tous les philosophes bouddhistes sont unanimes, même si leurs définitions et découpages peuvent sinon varier.

Pour la suite, par souci de clarté, je précise que je vais ici me fonder sur les vues philosophiques madhyamika, et plus particulièrement madhyamika prasangika.

Observer ce qui existe sous l’angle des deux vérités a pour finalité d’établir le mode d’être de ce qui existe.

Vérité ultime désigne le mode d’être véritable de l’objet observé, c’est-à-dire selon les philosophes madhyamika, le fait que cet objet n’existe pas "réellement", autrement dit n'existe pas en soi.

Vérité conventionelle désigne le mode d’être apparent. L'objet  existe mais en dépendance.
Selon sa nature, composée ou non, tout objet dépend en effet de ses causes et conditions, ou au moins de sa dénomination.

Par exemple, ce blog ne s'est pas auto-généré, et il ne s'autogère pas non plus. Il dépend du support numérique, de l'ordinateur utilisé, des auteurs, des articles, des lecteurs, etc. Il possède donc deux niveaux d'existence, deux "vérités" (ou encore sortes de réalité) : son mode d'existence ultime est de ne pas se suffire à lui à lui-même, et donc d'être vide d'une quelconque réalité propre : c'est ce qu'on appelle le non-soi du blog, ou encore la vacuité du blog.
 

ཀུན་རྫོབ་ En tibétain, le mot que je rends par "conventionnel", et que d’autres traduisent par "relatif", signifie littéralement « mensonger ».

Qu’est-ce que la vérité conventionnelle par exemple de notre planète Terre ? C’est la planète apparente. La Terre nous apparaît d’une manière mensongère, mais pas radicalement erronée : indiscutablement, notre planète Terre existe (pour le moment), et elle nous rend bien service !  Elle nous fournit un cadre de vie confortable et généreux.
Mais contrairement aux apparences, elle n’existe pas ultimement. Les apparences sont mensongères en ce sens que nous avons l’impression que l'existence de la Terre va de soi, et nous nous imaginons qu'elle existe en soi. C’est là une grave erreur de notre part. Car la Terre est comme nous : elle dépend de causes et de conditions. Elle est née, elle a une certaine durée d’existence – qui n’est pas fixe – et un jour elle disparaîtra. Comme n’importe quel phénomène composé.
Or, à force de modifier les conditions, en polluant le sol et les eaux, en saccageant la flore, en massacrant la faune, nous risquons de la rendre invivable, et peut-être de provoquer prématurément sa disparition. Et en même temps la nôtre.

C’est pour cela qu’il serait important de mieux réfléchir aux choses en tant que vérités conventionnelles.
Nous le faisons bien sûr, mais nous aurions tout intérêt à continuer à creuser.
A ce jour, l'observation des vérités conventionnelles a quand même déjà permis de faire pas mal de découvertes, sur les plans technique ou scientifiques. 
Par exemple, nous vivons sur la terre, nous nous y déplaçons, nous y vivons, et cela nous semble aller de soi, c’est-à-dire cela nous semble exister en soi. Or, la gravitation ne va pas de soi et n’existe pas en soi.  Le Bouddha l’a énoncé il y a environ deux mille cinq cents ans et en Occident les scientifiques ont fini par l’admettre à leur tour. Les travaux de Newton ont permis d’envoyer des hommes sur la lune, et ceux d’Einstein de passer de la notion de force à celle d’interaction.
Or, qui dit interaction dit interdépendance. Et qui dit interdépendance dit absence de nature propre, et donc vacuité. Vacuité au sens de vide d’existence en soi, de réalité en soi.

D’un autre côté, qui dit interaction dit aussi la nécessité de l’existence des phénomènes susceptibles d'interagir. D’où l’importance de favoriser et développer les phénomènes
pouvant avoir des effets bénéfiques, ou simplement utiles, dont l'amour, la compassion, la sagesse. Inversement, mieux vaudrait neutraliser, et même annihiler les phénomènes nocifs, tels que l'attachement, l'aversion, l'ignorance. Cela a toujours été souhaitable, et il semble que cela devienne urgent, et même vital.

Par exemple, sur le plan matériel, nous ne pouvons plus nous contenter de faire plancher les adolescents sur le sujet « L’eau c’est la vie » dans le cadre d’un simple devoir de philosophie. Il vaudrait mieux que chacun y réfléchisse et en tienne compte, mais dès la prime enfance, et jusqu’à la fin de sa vie. Quand nous arriverons à dépasser la connaissance intellectuelle et aurons pris conscience de ce que représente l'eau pour notre vie (et "accessoirement" celle des autres), nous ne pourrons plus que nous abstenir de gaspiller l'eau et la polluer.

Autrement dit, observer ce qui existe sous l’angle de vérités conventionnelles, peut nous permettre de comprendre que l’existence est par définition interdépendante, ce qui en principe doit au moins nous amener à des conduites plus éthiques.

Tant qu’en dépit des avertissements des scientifiques, nous continuerons à croire que les océans existent en soi, nous continuerons à les polluer en toute insouciance. Tant que nous croirons que la faune et la flore existent en soi, nous continuerons à massacrer et dévaster.
En revanche, quand nous réaliserons que nous dépendons de la planète, que nous dépendons des réserves d’eau, que nous dépendons des abeilles et des plantes, nous devrions devenir plus respectueux de l’environnement, des autres êtres et aussi de nous-mêmes.
Par exemple, alors qu’il est évident que notre santé et notre vie dépendent étroitement de notre alimentation, nous achetons à prix fort des aliments qui sont de véritables poisons bourrés de mercure, de sucre, de graisse et d’OGM. Pourquoi ?
À un niveau superficiel, nous agissons ainsi par attachement au court terme, au plaisir immédiat, et aussi par égoïsme.
Si nous poursuivons notre enquête, nous allons découvrir qu'en amont, la source première de nos erreurs, et de leurs conséquences, est l'ignorance qui nous aveugle, nous empêchant de prendre conscience que nous sommes certes des « réalités » mais « conventionnelles », pas absolues, pas autosuffisantes. Loin d'être des entités indépendantes, capables de vivre isolément par nous-mêmes, nous sommes des réalités conventionnelles qui dépendent des autres réalités conventionnelles. Ce n'est pas un défaut, mais une manière d'être, et même la seule manière d'être : rien n'est absolu. Résignons-nous à cette évidence, et tirons-en des conclusions.
De toute façon, dans l'hypothèse où existerait quelque chose d'absolu, il serait isolé. Par définition, ce serait sans lien avec quoi que ce soit d'autre que lui. Ce qui signifie que cela ne pourrait être ni perçu, ni nommé, et ne pourrait pas avoir d'effet - faute de pouvoir entrer en interaction.

Comprendre la notion de vérité conventionnelle ne suffit pas pour obtenir la libération du samsara, mais cela y contribue.
Même si la vérité conventionnelle se cantonne au mode apparent des choses, mieux nous la comprendrons, mieux nous irons. Car sa compréhension nous permettrait de comprendre la causalité, les interactions, et comme nous l’avons déjà vu, cela nous mènerait à l’éthique. Or, l’éthique est nécessaire pour l’ordre public, la paix sociale, l’harmonie. Comme l'énonce Nagarjuna dans Le Ratnavali : De l'éthique procède le bonheur.

Une fois que nous aurons bien compris que toute vérité conventionnelle suppose un mode d'existence interdépendant, il nous suffira d'en déduire le vide de toute existence indépendante, et nous aurons compris la vacuité. Nous aurons alors obtenu notre sésame pour la cité de la libération !

samedi 1 février 2020

Dagpo Rinpoche - du Tibet en France

Pour lire ou relire une interview de Dagpo Rinpoche  
Revue Question De, No 61. 1985 

Rinpoche parle du bouddhisme au Tibet, des quatre courant tibétains principaux et de l'arrivée du bouddhisme en Occident, et plus particulièrement en France