mercredi 25 novembre 2020

Je pense, donc je suis

 Quoique parlant souvent de non-soi, les bouddhistes ne sont pas des nihilistes !

Loin de nier l'évidence, ils admettent qu'il existe un soi, un moi, un "je", bref un individu.

 

Cet individu qui existe est décrit de différentes manières par les différents 

courants philosophiques.

Sammitya (sous-école vaibhashika)

Le moi est indescriptible anabhilapyatman

Vaibhashika en général

Le moi n’est que l’assemblage des 4 ou 5 agrégats,

qui forment sa base d’imputation (prajnapya)

Quelques vaibhashika

Le moi n’est autre que la forme samsthana

Sautrantika suivant les textes

Le moi est le continuum des agrégats skandhapravaha

Sautrantika et cittamatrin suivant les raisonnements + madhyamika svatantrika

Le moi est la conscience mentale manovijnana

Cittamatra suivant les textes

Le moi est la conscience tréfonds alayavijnana

 

Madhyamika prasangika

Le moi est une notion qui apparaît à partir

 des 4 ou 5 agrégats, base d’imputation

Le moi n’est que la conception du moi formée

à partir des 4 ou 5 agrégats, base d’imputation

Tous les bouddhistes

C’est le continuum mental qui passe d’une vie à l’autre


Le bouddhisme au Tibet

Exposer l'histoire du bouddhisme au Tibet serait très, trop long. 

En très simplifié, le bouddhisme est officiellement introduit au Tibet au VIIème siècle par Songtsen Gampo. Ce 33ème roi de la dynastie Yarlung (qui remonte au IIème siècle avant J.-C.) unifie le Tibet en réunissant les 3 provinces du Centre (Ü et Tsang), du Kham et de l'Amdo, et envoie en Inde une délégation menée par Thönmi Sambhota avec mission de créer une langue et d'une écriture communes pour traduire et diffuser le bouddhisme. 

Son œuvre est poursuivie par ses successeurs, notamment les 38ème et 41ème rois : Trisong Detsen (704 ? – 797) et Tri Rälpachen (806-838). Tous trois sont connus dans l’histoire du Tibet comme les « Trois Rois religieux », Chögyal. Ils invitent des maîtres érudits, subventionnent des équipes mixtes de traducteurs (des lettrés ayant pour langue maternelle le chinois, le népalais, la langue de Gilgit et surtout - et bientôt uniquement - le sanskrit + des traducteurs tibétains)1, prennent des décrets pour uniformiser la langue de traduction, organisent des colloques, parrainent la construction de monastères et de temples, etc.

A titre d’exemple, entre autres mesure pour favoriser l'implantation du bouddhisme, Rälpachen fait construire à l'ouest de Lhasa un bâtiment qui comporte rien moins que neuf étages : les trois étages supérieurs, en bois, abritent les textes sacrés et les statues ; les trois étages médians, en briques, sont réservés aux pandits et aux traducteurs. C'est dans les trois étages inférieurs, en pierre, que résident et travaillent le roi et ses ministres. Rälpacän encourage – déjà ! – une simplification de l'orthographe tibétaine.  Il ne néglige pas ses devoirs de souverain et fait frapper la monnaie tibétaine, sur le modèle de la monnaie indienne du Maghada. La centralisation planifiée par ce "tyran éclairé", son dirigisme ainsi que, sans doute, l'impulsion qu'il donne au bouddhisme déplaisent foncièrement à certains nobles qui voient s'effriter leurs pouvoirs et privilèges. 

L’assassinat de Rälpacän marque la fin de la « Première Diffusion » du bouddhisme au Tibet, et bientôt celle de la monarchie. Son frère Langdarma (803-842), soutenu par la noblesse favorable à la religion indigène, le bön, est assassiné à son tour, par un moine bouddhiste qui parvient à s’enfuir dans l’est du Tibet.

Après environ 80 ans dans la clandestinité et la morcelisation de l’empire suite aux rivalités entre les deux fils de Langdarma, le bouddhisme connaît un nouvel essor au XIème siècle.  De 1246 à 1959, au fil des alliances avec les Mongols puis les Mandchous, le pouvoir va être assuré successivement par diverses écoles du bouddhisme "tibétain"2, le plus souvent par un gouvernement civil sous le parrainage spirituel des chefs religieux :
- de 1246 à 1354 : sakyapa
- à partir de 1354 : phagmodrupa (école kagyupa)
- à partir de 1434 : rinpung (école kagyupa)
- à partir de 1566 : tsangpa (école kagyupa)
      à partir du XVIème siècle : ascension des gelugpa :
* vers 1574, Altan Khan offre le titre de dalaï-lama à Sönam Gyatso, et à titre posthume à ses deux prédécesseurs
* le 4ème dalaï-lama, Yönten Gyatso, naît en Mongolie et vient au Tibet à 12 ans. Il est petit-fils d’Altan Khan.

- De 1642 au 10 mars 1959, gelugpa
En 1642, Güshi Khan vainc le roi de Tsang, lié aux écoles kagyupa et jonangpa (qui de ce fait vont être les objets de mesures répressives : confiscation de monastères, etc.), et institue le 5e dalaï-lama Lobsang Gyatso (1617-1682) chef spirituel et temporel du Tibet, qui s'étend à l’époque de Dartsédo aux portes de la Chine jusqu'aux frontières du Ladakh. Débute alors ce que l’on appelle souvent la théocratie des dalaï-lama, lesquels exercent peu ou pas le pouvoir temporel, à l’exception des 5ème, 13ème et 14ème dalaï-lama. Même du temps du 5ème dalaï-lama, les régents (premiers ministres), laïques, jouent des rôles prépondérants, au point que le Régent Sangyé Gyatso parvient à cacher sa mort rien moins que … 12 ans, afin d’achever la construction de l’immense palais du Potala.

Le 6ème dalaï-lama, Tsangyang Gyatso (1683-1706 ou beaucoup plus tard, en Mongolie), n’est pas non plus tibétain, mais Mönpa. Reconnu tout enfant mais mis au secret jusqu’en 1697 par Sangyé Gyatso qui tient à terminer le palais (et peut-être bien à garder le pouvoir), il se rebelle et refuse de mener une vie monastique, tant et si bien que, taxé de « dépravé » (il a laissé de nombreux chants d’amour, très poétiques), il est déposé par Lhazang Khan en 1706 et contraint à l’exil. Selon les versions, il meurt en chemin ou gagne la Mongolie, où il prend femme.

Le 7ème dalaï-lama, Kelzang Gyatso (708-1757) lettré, poète et mystique, est néanmoins celui qui pose le cadre du gouvernement et de l’administration, en vigueur jusqu’à 1959 : en 1751, il remplace le poste de régent par un conseil des ministres, car il estime dangereux que trop de pouvoir soient entre les mains d’un seul homme. En 1753, il crée l’école de Tsé, qui forme les cadres du gouvernement, répartis en deux groupes parallèles : les laïcs et les religieux. Tolérant, il autorise la construction d’une église catholique à Lhasa, pour répondre aux besoins des 25 catholiques présents dans la capitale.

Tenzin Gyatso, 14ème dalaï-lama (né en 1935), quitte le Tibet en mars 1959, suite à l’invasion du Tibet par les troupes chinoises. Il s’installe en Inde, à Dharamsala, où il reconstitue un « gouvernement en exil ». Il reçoit le prix Nobel de la paix en 1989. En mars 2011, il annonce qu’il renonce au pouvoir temporel, mais continue à parcourir le monde.

Il est à noter que les dalaï-lama ne sont pas les chefs de l’école Gelugpa à laquelle ils appartiennent3  et qui est dirigée par le Ganden Tripa, ancien abbé de l’un des deux grands monastères tantriques, Gyudmed et Gyutö, en alternance. Gedun Gyatso (1391-1474), rétroactivement premier dalaï-lama, pressenti pour cette fonction, l’avait décliné pour se consacrer à l’organisation du monastère qu’il venait de fonder dans la région du Tsang : Tashi Lhunpo, devenu par la suite le siège des Panchen lama, titre très honorifique offert par le 5ème dalaï-lama à son maître et à son lignage de réincarnations.

1 Ils traduisent également des traités d'astrologie, de médecine et de techniques.
2 Quatre écoles principales se sont constituées : l’école des Anciens : Nyingmapa (qui remonte de la Première Diffusion) et trois écoles des Nouveaux : Kadampa/Gelugpa, Sakyapa et Kagyupa.
3 Les 5ème, 6ème et 14ème dalaï lama, nés dans des familles nyingmapa (qui remonte à la Première Diffusion), mettent beaucoup l’accent sur les enseignements nyingma.

mardi 24 novembre 2020

Bouddhisme et démocratie

C'est le jour des partages. :-) Un grand merci à D. T. qui m'a communiqué un lien vers une vidéo en tibétain.

Si vous préférez, il y a l'équivalent dans cet article en anglais.

En résumé, l'auteur se réfère à un extrait du Mahaparinirvana Sutra qui rapporte entre autres 7 points soulevés par le Bouddha à propos de la nation des Vrijjis, en quelque sorte les critères qui décriraient un système démocratique en bonne santé.

Il faut bien sûr tenir compte du contexte culturel et de l'époque - cela remonte à 2600 ans.

En traduction française approximative :

1° Les Vrijjis tiennent-ils des assemblées fréquentes et régulières et tous les membres 
y participent-ils régulièrement ? 
 
2° Les Vrijjis commencent-ils et terminent-ils leurs assemblées dans un climat amical, 
 et mènent-ils les affaires en bonne entente ?
 
3° Les Vrijjis agissent-ils conformément à la constitution, ou érigeraient-ils 
sans cesse de nouvelles règles au mépris des lois existantes ?
 
4° Les Vrijjis respectent-ils et honorent les aînés, et veillent-ils à tenir 
compte de leurs conseils ?
 
5° Les Vrijjis s'abstiennent-ils d'enlever des femmes et des jeunes filles et 
de les maltraiter ?
 
6° Les Vrijjis font-ils preuve de respect et de vénération envers les sanctuaires ?
 
7° Les Vrijjis prennent-ils des dispositions appropriées pour assurer la sécurité 
et le bien-être des arhats (sages/saints), afin que les arhats se sentent les bienvenus 
sur leur terre ?

Existe-t-il une réalité extérieure à l'observateur ?

 Toujours dans le cadre du partage, un grand merci à D. B. qui m'a envoyé ce lien, 

https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/la-methode-scientifique-emission-du-mardi-17-novembre-2020

Thème

La théorie quantique est-elle compatible avec l’existence d’une réalité objective, indépendante de l’observateur ? Quel est le problème entre la mesure et la réalité ? Comment la mesure de l’observateur influe-t-elle sur la réalité ? La réalité existe-elle en dehors de l’observation ?

 


Zoom

Dans le cadre d'un partage d'information, voici quelques liens vers cinq courts tutoriels vidéo en français pour mieux utiliser les fonctions Zoom. 

Un grand merci aux auteurs, canadiens.

Enregistrer une réunion (cloud ou local)

Utiliser la fonction « petits groupes »
N.B. : il faut avoir auparavant codé la fonction "petits groupes" dans les paramètres du compte zoom sur le site web officiel: https://zoom.us/profile/setting (en réunion (avancé)/ Salles en petits groupes)

Utiliser le partage d’écran (simple)

Utiliser le partage d’écran (avancé)

Programmer une réunion périodique
Cette fonction permet d’avoir toujours la même adresse Zoom pour une activité hebdomadaire donnée, sans devoir en recréer une à chaque fois.

vendredi 20 novembre 2020

Karma n'est pas fatalité

 Conférence de MS B sur "Le Karma n'est pas fatalité"

lors de la Journée Portes Ouvertes de l'institut Guépèle , le 22 Septembre 2011.

 


 

jeudi 19 novembre 2020

La non violence

 Conférence de Dagpo Rinpoché sur "La non violence, cœur du Bouddhisme", lors de journée Portes Ouvertes à l'institut Guépèle, en 2011.

 


 

mercredi 18 novembre 2020

Dialogue et respect mutuel

 Ashoka, troisième empereur Maurya (273 av. J.-C. – 232 av. J.-C.)

Extrait du 12ème décret, gravé dans un rocher :

« L'épanouissement des religions est essentiel et peut s'accomplir par divers voies, mais toutes supposent de ne pas privilégier uniquement sa propre religion ni condamner la religion d'autrui sans une grande raison. Et s'il y a motif à critique, elle doit être dite avec douceur. On ne devrait pas honorer seulement sa propre religion et condamner les religions des autres, mais on devrait honorer les religions des autres pour cet aspect ci ou cet aspect là. Agir ainsi bénéficie sa propre religion ainsi qu'à celle des autres. En agissant autrement, on nuit à sa propre religion ainsi qu'à celle des autres.

Quiconque célèbre sa propre religion avec une dévotion excessive et condamne les religions des autres, pense ainsi glorifier sa propre religion mais il ne fait que lui nuire gravement. C'est pourquoi le contact entre les religions est bon. Il importe que chacun écoute et respecte les doctrines professées par autrui. »



mardi 17 novembre 2020

Le "renoncement" ངེས་འབྱུང་

 Pas de pratique du Dharma sans "renoncement", au minimum aux seuls plaisirs de la vie en cours, ou mieux au samsara.


Oui, mais c'est quoi, le "renoncement"?

En fait, le terme utilisé en français pour traduire ངེས་འབྱུང་ n'est vraiment pas parlant, mais sans doute a-t-il été  choisi faute de mieux.


ངེས་ signifie "à coup sûr", "certainement".

འབྱུང་བ་ rend le sens de "sortir".

En résumé, c'est un état d'esprit - en lien avec le facteur mental vertueux "non-attachement" - qui consiste à n'avoir plus qu'un envie, sortir au plus vite du samsara, parce qu'on est désormais pleinement conscient de son abominable nature de souffrance.

Cf. Dans L’Abhidharmasamuccaya, Asanga  énonce :  

Qu’entend-on par non-attachement ? 

Vis-à-vis du samsara et des jouissances du samsara, c’est une absence d’attachement. Sa fonction est de procurer un support à une bonne abstention des mauvaises conduites.

 


mercredi 11 novembre 2020

Nous serons libres un jour

 Selon le bouddhisme, tout être a la nature de Bouddha, et obtiendra un jour l'Éveil, après avoir vaincu et éliminé tous les obstacles, qu'ils relèvent du voile des klesha (l'ignorance et autres facteurs perturbateurs) ou du voile à l'omniscience.

 C'est en ces termes que j'entends aujourd'hui cette magnifique chanson, ici interprétée par Joan Baez.

We shall overcome,
Nous vaincrons,
We shall overcome,
Nous vaincrons,
We shall overcome, some day.
Nous vaincrons, un jour

 

Oh oh, deep in my heart,
Oh oh au fond de mon cœur
I do believe
Je crois
We shall overcome, some day.
Que nous vaincrons, un jour

 

We'll shall be alright
Nous serons bien
We'll shall be alright
Nous serons bien
We'll shall be alright
Nous serons bien, un jour

 

We shall overcome,
Nous vaincrons
We shall overcome,
Nous vaincrons
We shall overcome, some day.
Nous vaincrons, un jour

 

We shall live in peace,
Nous allons vivre en paix,
We shall live in peace,
Nous allons vivre en paix,
We shall live in peace, some day.
Nous allons vivre en paix, un jour

 

Oh oh, deep in my heart,
Oh oh au fond de mon cœur
I do believe
Je crois
We shall overcome, some day.
Que nous vaincrons, un jour

 

We are not afraid,
Nous n'avons pas peur,
We are not afraid,
Nous n'avons pas peur,
We are not afraid, today
Nous n'avons pas peur, aujourd'hui

 

Oh oh, deep in my heart,
Oh oh au fond de mon cœur
I do believe
Je crois
And we shall overcome, someday
Et nous vaincrons un jour

 

We shall overcome,
Nous vaincrons
We shall overcome,
Nous vaincrons
We shall overcome, some day.
Nous vaincrons, un jour

 

Oh oh, deep in my heart,
Oh oh au fond de mon cœur
I do believe
Je crois
And we shall overcome, someday
Et nous vaincrons un jour

 



 

De l'amour

 Un magnifique hymne à l'amour

Maitri : l'une des qualités majeures du Dharma, et notamment du mahayana

 


"Glorificamus Te: Pater Omnipotens, Glorificamus te. (x3)*  

 

On m'avait dit que le bonheur était  

Un trésor à chercher.  

Je suis parti loin de ma maison,  

Très loin, très loin,  

Au-delà des contrées.  

 

Ici, là-bas et plus loin encore  

J'ai cherché, cherché, et n'ai rien trouvé, 

 Car j'ignorais que le trésor est en moi  

Et c'est Toi, mon Dieu, qui l'a déposé  

Au fond de mon coeur.  

 

(Pater omnipotens, glorificamus te ...)  


On m'avait dit que le bonheur était bien au-delà des cieux  

Je l'ai trouvé, il est près de ma maison 

Je sais enfin la vérité 

 

Je sais désormais que le bonheur  

C'est l'amour donné, c'est l'amour reçu  

C'est le partage et c'est une main tendue  

A ceux qui ont froid, à ceux qui ont faim, à ceux qui sont seuls.  

 

Pater Omnipotens, Glorificamus te (4)  

 

Alors ne cherchez pas si loin ce qui est tout auprès de vous. 

 Il suffirait d'ouvrir grand, plus grand vos yeux 

 Et surtout d'ouvrir votre coeur.  

 

Le sourire d'un tout petit enfant,  

Celui d'un vieillard qui vous tend les bras  

Ils espèrent de vous un petit peu d'amour  

Là est le bonheur, ne l'oubliez pas  

Et saisissez-le!  

 

(Pater Omnipotens, Glorificamus te...)  

 

On m'avait dit que le bonheur était bien au-delà des cieux  

Je l'ai trouvé, il est près de ma maison  

Je sais enfin la Vérité.  

 

Pater Omnipotens Glorificamus te (x2)

mercredi 4 novembre 2020

Lhabab duchen 2020


La fête de Lha bab dus chen tombe cette année le samedi 7 novembre.
 


Pour rappel :
Juste après avoir montré l'obtention de l'Eveil suprême à Bodhgaya, le Bouddha se rendit dans un monde de deva connu sous le nom de Trente-Trois, pour y dispenser des Enseignements à sa mère qui avait repris naissance là.

La fête
ལྷ་བབས་དུས་ཆེན, le 22ème jour du 9ème mois lunaire, commémore son retour dans notre monde humain.

 
Selon la tradition, ce jour là, toutes les vertus effectuées sont multipliées par
10 millions.

dimanche 1 novembre 2020

Pourquoi les guerres ?

Message des petits chanteurs à la croix de bois (2001)

Paroles et musique : Mike Ofer
Soliste : Clément M 

Direction : Véronique Thomassin

 


 

Dites-moi pourquoi toutes ces guerres,
La haine, le sang et la misère ?
On est tous nés sur cette terre,
Pour vivre heureux comme des frères.
Dis-moi papa, pourquoi ces morts ?
Au nom de Dieu, de tous les bords ?
On viole, on tue, on assassine.
Petits et grands, on les supprime.
Dis-moi ma sœur, pourquoi tu pleures?
Au pied des tours, y'avait des fleurs.
Des hommes, des femmes et des enfants
Que nous aimerons éternellement.

Quel Dieu a dit ? Et de quel droit ?
Qu'on veut nous imposer des lois !
Sans liberté, sans espérance,
Blancs ou noirs sans différence.
Où les femmes souffrent, comme des esclaves
Et vivent l'enfer, soumises mais braves.

Et toi maman, essuie tes larmes.
Ils ont tué, ils ont des armes.
Nos âmes blessées sont en colère :
Il y a des fous qui veulent la guerre.

Criez au monde, vous les Nations :
Qu'il faut punir l'éducation
Qui prêche la haine, la mort, le sang,
Dans le désespoir des pauvres gens.
Au monde entier, nous le disons :
Il n'y a pas de religion
Qui prêche la haine, la mort, le sang.
Pourquoi tuer les innocents ?
Pourquoi détruite ?
Nous faire souffrir ?
Nous voulons vivre et ne pas mourir !

Pour toutes les femmes qui sont esclaves.
Qui vivent l'enfer, soumises mais braves.
Un jour viendra, nos fils joueront
Sans haine, ni guerres de religions.

Un jour viendra, nos fils joueront
Sans haine, ni guerres de religions.
Assez de guerres, jetez vos armes !
Plus d'orphelins, ni sang, ni larmes !
Au monde entier, à toutes les races:
New-York, elle vit et vous embrasse.
L'espoir, l'amour, la paix viendront.
Toi, LIBERTÉ, nous gagnerons.
LA LIBERTÉ, NOUS GAGNERONS.

 

Lettre de Jean Jaurès aux instituteurs 1888

La Lettre aux instituteurs et aux institutrices, de Jean Jaurès (1859-1914)

publiée dans la Dépêche de Toulouse le dimanche 15 janvier 1888

 

« Vous tenez en vos mains l’intelligence et l’âme des enfants ; vous êtes responsables de la patrie. Les enfants qui vous sont confiés n’auront pas seulement à écrire et à déchiffrer une lettre, à lire une enseigne au coin d’une rue, à faire une addition et une multiplication. Ils sont Français et ils doivent connaître la France, sa géographie et son histoire : son corps et son âme. Ils seront citoyens et ils doivent savoir ce qu’est une démocratie libre, quels droits leur confère, quels devoirs leur impose la souveraineté de la nation. Enfin ils seront hommes, et il faut qu’ils aient une idée de l’homme, il faut qu’ils sachent quelle est la racine de toutes nos misères : l’égoïsme aux formes multiples ; quel est le principe de notre grandeur : la fierté (-> fermeté) unie à la tendresse. Il faut qu’ils puissent se représenter à grands traits l’espèce humaine domptant peu à peu les brutalités de la nature et les brutalités de l’instinct, et qu’ils démêlent les éléments principaux de cette œuvre extraordinaire qui s’appelle la civilisation. Il faut leur montrer la grandeur de la pensée ; il faut leur enseigner le respect et le culte de l’âme en éveillant en eux le sentiment de l’infini qui est notre joie, et aussi notre force, car c’est par lui que nous triompherons du mal, de l’obscurité et de la mort.

Eh quoi ! Tout cela à des enfants ! - Oui, tout cela, si vous ne voulez pas fabriquer simplement des machines à épeler. Je sais quelles sont les difficultés de la tâche. Vous gardez vos écoliers peu d’années et ils ne sont point toujours assidus, surtout à la campagne. Ils oublient l’été le peu qu’ils ont appris l’hiver. Ils font souvent, au sortir de l’école, des rechutes profondes d’ignorance et de paresse d’esprit, et je plaindrais ceux d’entre vous qui ont pour l’éducation des enfants du peuple une grande ambition, si cette grande ambition ne supposait un grand courage.

J’entends dire, il est vrai : « À quoi bon exiger tant de l’école ? Est-ce que la vie elle-même n’est pas une grande institutrice ? Est-ce que, par exemple, au contact d’une démocratie ardente, l’enfant devenu adulte ne comprendra point de lui-même les idées de travail, d’égalité, de justice, de dignité humaine qui sont la démocratie elle-même ? » — Je le veux bien, quoiqu’il y ait encore dans notre société, qu’on dit agitée, bien des épaisseurs dormantes où croupissent les esprits. Mais autre chose est de faire, tout d’abord, amitié avec la démocratie par l’intelligence ou par la passion. La vie peut mêler, dans l’âme de l’homme, à l’idée de justice tardivement éveillée, une saveur amère d’orgueil blessé ou de misère subie, un ressentiment et une souffrance. Pourquoi ne pas offrir la justice à des cœurs tout neufs ? Il faut que toutes nos idées soient comme imprégnées d’enfance, c’est-à-dire de générosité pure et de sérénité.

Comment donnerez-vous à l’école primaire l’éducation si haute que j’ai indiquée ? Il y a deux moyens. Il faut d’abord que vous appreniez aux enfants à lire avec une facilité absolue, de telle sorte qu’ils ne puissent plus l’oublier de la vie et que, dans n’importe quel livre, leur œil ne s’arrête à aucun obstacle. Savoir lire vraiment sans hésitation, comme nous lisons vous et moi, c’est la clef de tout. Est-ce savoir lire que de déchiffrer péniblement un article de journal, comme les érudits déchiffrent un grimoire ? J’ai vu, l’autre jour, un directeur très intelligent d’une école de Belleville, qui me disait : « Ce n’est pas seulement à la campagne qu’on ne sait lire qu’à peu près, c’est-à-dire point du tout ; à Paris même, j’en ai qui quittent l’école sans que je puisse affirmer qu’ils savent lire. » Vous ne devez pas lâcher vos écoliers, vous ne devez pas, si je puis dire, les appliquer à autre chose tant qu’ils ne seront point par la lecture aisée en relation familière avec la pensée humaine. Qu’importent vraiment à côté de cela quelques fautes d’orthographe de plus ou de moins, ou quelques erreurs de système métrique ? Ce sont des vétilles dont vos programmes, qui manquent absolument de proportion, font l’essentiel.

J’en veux mortellement à ce certificat d’études primaires qui exagère encore ce vice secret des programmes. Quel système déplorable nous avons en France avec ces examens à tous les degrés qui suppriment l’initiative du maître et aussi la bonne foi de l’enseignement, en sacrifiant la réalité à l’apparence ! Mon inspection serait bientôt faite dans une école. Je ferais lire les écoliers, et c’est là-dessus seulement que je jugerais le maître.

Sachant bien lire, l’écolier, qui est très curieux, aurait bien vite, avec sept ou huit livres choisis, une idée, très générale, il est vrai, mais très haute de l’histoire de l’espèce humaine, de la structure du monde, de l’histoire propre de la terre dans le monde, du rôle propre de la France dans l’humanité. Le maître doit intervenir pour aider ce premier travail de l’esprit ; il n’est pas nécessaire qu’il dise beaucoup, qu’il fasse de longues leçons ; il suffit que tous les détails qu’il leur donnera concourent nettement à un tableau d’ensemble. De ce que l’on sait de l’homme primitif à l’homme d’aujourd’hui, quelle prodigieuse transformation ! et comme il est aisé à l’instituteur, en quelques traits, de faire sentir à l’enfant l’effort inouï de la pensée humaine !

Seulement, pour cela, il faut que le maître lui-même soit tout pénétré de ce qu’il enseigne. Il ne faut pas qu’il récite le soir ce qu’il a appris le matin ; il faut, par exemple, qu’il se soit fait en silence une idée claire du ciel, du mouvement des astres ; il faut qu’il se soit émerveillé tout bas de l’esprit humain, qui, trompé par les yeux, a pris tout d’abord le ciel pour une voûte solide et basse, puis a deviné l’infini de l’espace et a suivi dans cet infini la route précise des planètes et des soleils ; alors, et alors seulement, lorsque, par la lecture solitaire et la méditation, il sera tout plein d’une grande idée et tout éclairé intérieurement, il communiquera sans peine aux enfants, à la première occasion, la lumière et l’émotion de son esprit. Ah ! sans doute, avec la fatigue écrasante de l’école, il vous est malaisé de vous ressaisir ; mais il suffit d’une demi-heure par jour pour maintenir la pensée à sa hauteur et pour ne pas verser dans l’ornière du métier. Vous serez plus que payés de votre peine, car vous sentirez la vie de l’intelligence s’éveiller autour de vous.

Il ne faut pas croire que ce soit proportionner l’enseignement aux enfants que de le rapetisser. Les enfants ont une curiosité illimitée, et vous pouvez tout doucement les mener au bout du monde. Il y a un fait que les philosophes expliquent différemment suivant les systèmes, mais qui est indéniable : « Les enfants ont en eux des germes, des commencements d’idées. » Voyez avec quelle facilité ils distinguent le bien du mal, touchant ainsi aux deux pôles du monde ; leur âme recèle des trésors à fleur de terre : il suffit de gratter un peu pour les mettre à jour. Il ne faut donc pas craindre de leur parler avec sérieux, simplicité et grandeur.

Je dis donc aux maîtres, pour me résumer : lorsque d’une part vous aurez appris aux enfants à lire à fond, et lorsque d’autre part, en quelques causeries familières et graves, vous leur aurez parlé des grandes choses qui intéressent la pensée et la conscience humaine, vous aurez fait sans peine en quelques années œuvre complète d’éducateurs. Dans chaque intelligence il y aura un sommet, et, ce jour-là, bien des choses changeront. »


Sénèque (? - 65)

 Ô la vile chose et abjecte que l’homme, s’il ne s’élève au-dessus de l’humanité !

 

C'est-à-dire, je suppose, si on se contente de la nature imparfaite des agrégats souillés d'un être humain ordinaire du samsara, régi par les poisons de l'esprit - à commencer par l'ignorance, l'attachement et l'aversion.

Temps de dégénérescence

IIème siècle

Dans le Rajaparikatharatnamala (Guirlande de conseils au roi), Nagarjuna exhorte son interlocuteur à favoriser et subventionner écoles et enseignants (c'est-à-dire la culture ?) :

            À l'intérieur du territoire, pour chaque école, recrute des professeurs 

            et octroie des terres. Œuvre ainsi de manière à épanouir les connaissances.

 

Première moitié du XXème siècle

Quand d'aucuns suggérèrent à Winston Churchill (1874-1965) de couper dans le budget de la culture pour aider l’effort de guerre, il aurait juste répondu : « Mais alors, pourquoi nous battons-nous ? »

 

2020, fin octobre, France

En période d'inquiétante pandémie et d'abominables crimes terroristes (dus à l'ignorance et ses corollaires : attachement aversion => fanatisme), les règles d'un deuxième confinement stipulent l'ouverture uniquement des commerces "essentiels", dont ... les bureaux de tabac (Cf. D'après une estimation publiée dans la Revue du praticien (estimation de Catherine Hill, directrice du service d'épidémiologie des cancers de l'Institut Gustave Roussy), le nombre de décès attribuables au tabac serait de 73.000 par an en France en 2019).

 
En revanche, les libraires et autres vecteurs de la culture désormais considérée  comme un luxe superflu doivent rester fermés.

 

Décadence ? Dégénérescence ?


France - quelques chiffres
Estimation au 28 octobre 2020 : 35.785 décès attribués à la Covid-19.

2019 : le nombre de décès attribuables au tabac serait de 73.000 par an, d'après une estimation publiée dans la Revue du praticien (estimation de Catherine Hill, directrice du service d'épidémiologie des cancers de l'Institut Gustave Roussy), 

 

Bref, ... 

 

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Gilles Vigneault, poète et chanteur québécois
 
L'après se prépare maintenant
 
"Je ne me considère pas comme un oracle ou quelqu’un de sage. Enfin, sage : peut-être la semaine prochaine ! Mais je suis une personne à risque, j’ai 91 ans, c’est la seule chose qui me donne le droit de parler…
 
Ce que je fais aujourd’hui ? Eh bien, le Bouddha a dit : “Fais ce que tu fais d’habitude, en ayant beaucoup d’empathie.” Bouddha, j'en ai une statue dans mon jardin. Des fois, je vais la voir... Et je lui pose des questions. C’est drôle, elle me répond ! Elle me dit : “Pense à l’autre.” Elle me dit : “Tu es dans l’impermanence.” Je pense que c’est ce que la pandémie nous a laissé de plus précieux : nous ne serons plus les mêmes, comme nous n’avons plus été les mêmes après la bombe atomique. Aujourd’hui, il faut des réflexions qui ne soient pas toujours conduites par les taux d’intérêt et l'argent. Des fois, je me dis : “Est-ce que nous méritons la Terre ?”
 
Si je m’ennuie ? Je ne m’ennuie jamais ! L’expression “je m’ennuie” a une curieuse signification pour moi, c’est pronominal, ça rebondit sur le pronom : je suis celui qui ennuie moi ! Quand tu fais face à ça, tu te dis : “Je vais attendre que les autres m’ennuient, et là je vais me plaindre !” Je ne m’ennuie jamais. Je rêve beaucoup. Il m’arrive de parler. Mais il m’arrive beaucoup, beaucoup plus de me taire ! C’est simplement un exercice de préparation pour plus tard, c’est du rodage…
 
Ça ne sert à rien de se confiner à écouter la peur… La peur ! On la connaît, la peur. Elle arrive, laide comme un pou, on lui dit qu’elle est laide, elle retourne se maquiller et revient belle comme une déesse des variétés : faut jamais se laisser abuser par la peur !
 
C’est bien de prier ! Mais on ne peut pas se confier qu’aux prières. Quand on se confie aux prières, on donne le job à quelqu’un d’autre. Mais quand on se confie à soi-même, là on est à l’ouvrage !
 
On apprend qui nous sommes dans cette pandémie, on apprend que nous sommes tous devenus responsables de nous, et du voisin. C’est extraordinaire. Ça ne nous est jamais arrivé avant. C’est un moment de réflexion, de réalisation de ce qu’est la planète, de ce qu’on est… C’est la première fois dans l’histoire de la Terre habitée qu’on a une photographie instantanée de nous-mêmes. Et chacun de nous peut faire un selfie : c’est un immense miroir qui nous dit qui nous sommes et ce que nous faisons sur cette Terre. Qui nous dit d’où nous venons. Qui nous demande : “Êtes-vous digne de cette planète ?” Et on ne sait pas trop quoi répondre. C’est la première fois qu’on a une photographie qui nous renvoie notre image : est-ce qu’on continue comme ça ? Oui, il faut penser à l’autre, l’autre juste à côté… L’autre qu’on a un peu oublié…
 
Réfléchir, c’est fléchir le genou de nouveau, s’apercevoir qu’on s’est trompé. Réfléchir, c’est s’arrêter… Il y aura un après, il en est sûr. Mais l’après se prépare maintenant.
 
Alors le Bouddha m’a dit ce matin : “Que fais-tu aujourd’hui ?” J’ai répondu : “Du sirop !” Il m’a dit : “Continue et donnes-en à tout le monde…”"
 
Gilles Vigneault, poète-acériculteur québécois