En 1409, Je Rinpoche (c'est-à-dire Je Tsongkhapa, mais dans la tradition tibétaine, il est plus respectueux d'user d'un titre que du nom, d'où acte), Je Rinpoche donc établit le monastère de Ganden, non loin de Lhasa, conformément à une prédiction énoncée par le Bouddha Shakyamouni lorsqu'il reçut un rosaire de cristal des mains d'un jeune garçon - le futur fondateur de l'ordre gelugpa.
Depuis, c'est le "Détenteur du Trône" de Ganden, ou si vous préférez son Abbé, qui est à la tête de l'école. Au Tibet, jusqu'en 1959, le Ganden Tripa était extrêmement respecté, de tous les Tibétains et pas seulement des gelugpa, car il était de notoriété publique que seul un personnage d'un très haut niveau spirituel pouvait impunément accéder à cette charge. Toutes écoles confondues, on n'hésitait pas à traverser le haut plateau pour recevoir de lui l'ordination monastique.
De nos jours qu'en est-il ? L'histoire le dira. Mais nous sommes - hélas - en une période de dégénérescence accélérée, et les grands Maîtres ne font guère recette.
Les tout premiers successeur de Je Rinpoche furent ses disciples principaux, puis de grands Maîtres issus de divers monastères, qui jouissaient d'une telle réputation qu'ils faisaient l'unanimité. Le Ganden Tripa était (et d'ailleurs est toujours) assisté par ses deux prochains successeurs : le Jangste Chöje et le Shartse Chöje qui sont dans l'attente les supérieurs des deux collèges de Ganden et acccèdent en alternance au Trône de Ganden. Le système fonctionna sans heurt jusqu'au début du XVIIème siècle, plus exactement jusqu'au 36ème Ganden Tripa.
Né dans le Kongpo oriental, Tenzin Legshe avait successivement étudié à Dagpo Datsang, Sera Med et Gyudmed Datsang. Après avoir été abbé du collège tantrique, il fut intronisé Jangtsé Chöje puis Ganden Tripa en 1638. Il assumait cette fonction depuis sept ans lorsqu'il provoqua involontairement des troubles tels qu'il dut s'enfuir dans le Khams, à Chödong Pälbargön puis à Dru dans le Kongpo, où il décèda.
L'origine du problème ? C'est que Tenzin Legshe était Kongpowa. Or, les personnes de cette région qui entrent à Ganden ont le choix entre les deux collèges. Aucune règle ne leur impose d'entrer dans l'un ou l'autre. Par conséquent, certains en vinrent à dire que, comme Tenzin Legshe était d'une certaine manière affilié également à Shartse Datsang et qu'il représentait autant ce collège que l'autre (Jangtse), il n'était pas obligatoire que lui succédât le Sharpa Chöje. La situation s'envenima au point que les moines de Shartse prirent les armes pour s'emparer du Trône et y installer leur candidat ! Effectivement, Gedun Rinchen (alias Gedun Gyältsen) fut intronisé en 1644.
Pour éviter que de tels désordres ne se renouvellent, le dirigeant de l'époque, Depa Tsangpa édicta alors un certain nombre de mesures, qui restent appliquée de nos jours par les Tibétains en exil :
- alternance systématique entre Jangtse et Shartse ;
; - durée maximale de la fonction fixée à sept ans ;
- Ganden tripa issus exclusivement des deux collèges tantriques;
- nomination promulguée par le gouvernement tibétain ;
- première phase de l'intronisation obligatoirement au Palais du Dalaï-Lama; deuxième phase à Ganden.
Au Tibet, entre les deux cérémonies d'intronisation, le Ganden Tripa devait faire une halte en chemin chez une famille dénommée Tsangthog : autrefois, Je Rinpoche y avait moulu de l'orge, et son successeur devait faire de même avec du grain fourni par le gouvernement. La quantité obtenue était soigneusement examinée car elle indiquait un bon ou moins bon présage. Il faut dire que la meule à utiliser est en pierre, extrêmement lourde, et donc peu maniable, surtout pour une personne qui est par définition déjà âgée et souvent peu coutumière des tâches manuelles : le simple fait de réussir à manipuler un tel objet démontrait déjà des qualités hors du commun...
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