NONNES JAPONAISES à l'époque de MUROMACHI (1334-1602) : "Les communautés monastiques et le pouvoir"
Les nouvelles écoles religieuses fondées à l'époque de Kamakura se propagent peu à peu. L'idée que cette période est celle de la dégénérescence s'accentue et entraîne la prospérité du Bouddhisme populaire où l'on prône une foi aveugle et où les pratiques sont d'une extrême simplicité.
Pourtant, l'école qui connaît le plus grand succès est bien le Zen (moins accessible) grâce à la conversion du Shôgun Ashikaga imité par les guerriers des provinces. La rigueur et l'esprit d'ascèse exaltés par le Zen convenaient parfaitement à ces hommes rudes et renforça leurs tendances à la maîtrise de soi et au sacrifice. Protégé par les Ashikaga, le Zen occupa rapidement une position comparable à celles du Tendai et du Shingon à l'époque de Heian. Le système des temples principaux fut établi à Kyôto et à Kamakura.
Parallèlement à ceux des moines, on choisit cinq Amaderagozan (communautés de moniales), dans la branche Rinzai.
A Kyôto :
- le Keiai-ji fondé par Nyodai-ni;
- le Tsûgen-ji construit par Chisen-ni soeur de Mukyoku Shigen (deuxième supérieur du Tenryû-ji);
- le Danrin-ji fondé par Gikû à la demande de l'impératrice Danrin (Tachibana no Kachiko). Le Danrin-ji fut plus tard détruit et, sur ses ruines, Ashikaga Taka.uji (1305-1358) fit édifier le Tenryû-ji.
- le Gônen-ji (fondateur inconnu);
- le Erin-ji fondé en 1330 par un inconnu. Il fut brûlé en 1582 par Oda Nobunaga. On y trouve la tombe de Takeda Shigen (1521-1573) .
A Kamakura :
- le Taihei-ji, restauré par Seikei-ni (descendante de Ashikaka Moto.uji); il fut plus tard réuni au Tôkei-ji.
- le Tôkei-ji fondé par Gakuzan en 1286;
- le Kokuon-ji;
- le Gohô-ji;
- le Zenmyô-ji.
De ces trois derniers, il ne reste que des ruines.
Ces temples se développèrent et de nombreuses moniales s'y retirèrent pour y vivre dans toute la rigueur propre au Zen. Imitant les impératrices, les femmes du clan Ashikaga entrèrent en religion : Yôdô-ni, fille de l'empereur Godaigo, devint la cinquième supérieure du Tôkei-ji. Lui succédèrent à un certain intervalle : Kyokuzan-ni, fille de Ashikaga Yoshiaki (17ème supérieure du Tôkei-ji), puis Shôtai-ni (fille de Mochiuji), Shôzen-ni (fille de Shigeuji), Seigaku-ni (fille de Yoshiaki).
Le Tôkei-ji était un temple indépendant qui jouissait de privilèges spéciaux par décret impérial. A cette époque où les femmes étaient méprisées, rabaissées, n'avaient que le droit d'obéir et de servir leur époux, le Tôkei-ji était l'unique asile où pouvaient se réfugier les malheureuses incapables de supporter plus longtemps la brutalité ou la débauche de leur mari.
L'enceinte du Tôkei-ji était interdite aux hommes; c'était une sorte d'organisme pour la "protection de la femme". C'est ainsi que commença au Japon la tradition d'entrer en religion pour les femmes qui désiraient se séparer de leur époux; c'était la seule procédure de divorce qui leur sera permise pendant longtemps.
Trois religieuses se sont illustrées à cette époque : Shuetsu-ni, Seijun-ni, Shûyô-ni.
Shuetsu-ni, déplorant l'état de délabrement dans lequel se trouvait le pont sacré d'Ise, quêta des fonds à travers le pays entier pour le faire restaurer. Elle fut la première supérieure du Keikô (temple autonome de l'école Rinzai, construit à la fin de l'époque de Muromachi à Ise).
Seijun-ni effectua les travaux de réfection du grand sanctuaire d'Ise, ce qui n'avait pas été entrepris depuis cent trente ans, et fut la troisième supérieure du Keikô-in.
Shûyô-ni, qui lui succéda, recueillit des dons pour achever la construction des deux sanctuaires et accomplit des travaux de rénovation. Le pont qui enjambe la rivière Uji avait été détruit par un incendie; elle veilla à son remplacement et, quand il fut achevé, célébra sa consécration.
Toutes trois ont accompli de grandes tâches nationales, plus que bien des hommes. En récompense, les supérieures du Keikô-in ont reçu le titre de "Shônin" (Saint) et l'autorisation de porter l'habit violet (réservé aux dignitaires).
A la fin de la période de Muromachi, des changements s'annoncent. Le pouvoir des Ashikaga est tombé dans la décadence et les rênes du pays vont bient8t passer dans d'autres mains. L'époque Momoyama (1568-1603) voit l'émergence d'hommes. forts qui vont essayer d'unifier le Japon sous leur férule. Oda Nobunaga (1534-1582) et Toyotomi Hideyoshi (1536-1598) veulent créer un état centralisa- et stable; il est hors de question pour eux de laisser libre cours à la contestation car ils tiennent avant tout à l'Ordre (mot-clé sous le Bakufu d'Edo). Le plus simple étant d'empêcher de nuire ceux qui auraient la possibilité de créer des troubles, les privilèges des communautés religieuses (trop puissantes et, donc, trop dangereuses) sont supprimés. Ceux qui tentent de résister s'en repentent vite : de sanglantes répressions sont menées contre le Mont Hiei (en 1571, Nobunaga fait raser le Enryaku-ji), le Mont Kôya (en 1581) et le Kôfuku-ji (en 1580). Oda Nobunaga et Toyotomi Hideyoshi montraient la voie à leurs successeurs qui adoptèrent la même politique.
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