Le blog de MSB.
Indications historiques, anecdotiques voire doctrinales sur le bouddhisme.
dimanche 17 avril 2016
Cohérence cardiaque
Voilà qui explique - en partie - pourquoi et comment la méditation en général, et en particulier la concentration sur la respiration, est bonne pour le coeur.
Depuis plusieurs années, des études scientifiques ont démontré les effets positifs sur la santé de la méditation de pleine conscience : amélioration des défenses immunitaires, augmentation de la densité de matière grise dans le cerveau, importante réduction du nombre de jours d’arrêt maladie, les rhumes durent moins longtemps, les télomères se dégradent moins vite, les maladies de peau guérissent plus vite, amélioration de la santé cardio-vasculaire, etc.
Ces expériences ont été menées avec des méthodes scientifiques : utilisation de groupes témoin, mesures biologiques et imagerie médicale, etc.
Ceci dit il n’est pas certain que les bouddhistes profitent entièrement de ces bienfaits : en effet ces protocoles scientifiques utilisent la méditation de pleine conscience. Or la méditation de pleine conscience est davantage que la méditation sur le souffle, ce n’est pas de la méditation analytique, et ce n’est pas la méditation avec concentration utilisée par les pratiquants du lamrim.
La méditation de pleine conscience consiste à prêter attention à l’expérience vécue sans filtres. On accepte ce qui vient des 6 sens (par exemple tous les sons que d’habitude on ignore), les pensées, les états émotionnels, les signaux envoyés par le corps même s’ils sont déplaisants, les douleurs sans essayer de les repousser (ce n’est pas de la relaxation), sans analyser, sans juger, sans rien attendre.
J’ai l’impression que les bouddhistes font appel à d’autres types de méditation avec un but de progrès spirituel, mais qui ne sont peut-être pas aussi efficaces que la méditation de pleine conscience au niveau de la santé du corps.
Il se peut donc que même les bouddhistes puissent tirer parti d’un entraînement à la méditation de pleine conscience, non pas dans un but d’amélioration spirituelle qui est déjà l’objet de leur pratique, mais avec l’intention d’améliorer leur santé.
J'ai tendance à penser que, en dépit de l'absence d'expériences scientifiques à propos des méditations autres que la pleine conscience, elles ont néanmoins des effets positifs. Il est de notoriété publique en Inde et au Tibet que la respiration sur le souffle est bonne pour la santé, même si ce n'est qu'un effet secondaire et certainement pas le but principal. Cela s'explique entre autres par l'interdépendance entre nos différents plans.
Les biographies de maîtres et pratiquants du passé abondent en exemples, certes empiriques. :-)
Il y a quelques années, j'ai eu l'occasion d'être présente d'expériences dites scientifiques (en tant qu'interprète, le cobaye étant le moine tibétain que j'accompagnais), et j'en suis sortie quelque peu sceptique... Il me semble d'ailleurs que certains scientifiques admettent que le fait même d'observer un phénomène le transforme.
A mon avis, en tant que bouddhiste, utiliser une technique de méditation uniquement pour améliorer la santé serait insuffisant (et regrettable), car en ce cas il ne pourrait pas s'agir d'une pratique du Dharma. Il vaudrait mieux y ajouter un objectif de plus longue portée.
La méditation sur le souffle a beaucoup de vertus : elle permet de développer l’intention, l’attention, la concentration, elle permet de discipliner les pensées et elle est un antidote à la distraction, la dispersion et la paresse. C’est un élément essentiel de la voie bouddhique et je ne remets pas en cause son intérêt.
Mais en concentrant l’attention sur le souffle, les autres perceptions du corps sont gommées, alors que la méditation de pleine conscience ouvre toutes les portes des perceptions. Par exemple elle permet d’entendre toutes sortes de bruits qui d’habitude ne sont pas perçus tels que les bruits de vêtements, les bruits de notre corps, les milliers de bruits du monde extérieur. Il existe un exercice de pleine conscience qui consiste à « scanner » le corps, c’est à dire à porter notre attention sur toutes les parties du corps, les unes après les autres, ce qui permet de recevoir toutes sortes de messages, sensations ou petites douleurs qui d’habitude sont ignorées.
L’attitude la plus courante face aux sensations déplaisantes consiste à les ignorer, à tenter de les supprimer. Mais ce faisant nous privons notre cerveau d’informations essentielles. Le corps est capable de se réparer lui-même, mais encore faut-il qu’il puisse poser un diagnostic et pour cela il a besoin d’un maximum d’informations. Lorsque nous gommons les sensations et petites douleurs, le corps ne sait plus qu’il y a là quelque chose à corriger. C’est peut-être pour cela que la méditation de pleine conscience améliore la santé. (Ce que je dis-là est mon ressenti personnel et je n’ai pas de preuves de ce que j’avance).
En tout cas les protocoles scientifiques me semblent fiables : par exemple on injecte le vaccin contre la grippe à deux groupes, un qui médite 20 minutes par jours et un autre qui ne médite pas. Quelques semaines après, le groupe de méditants a développé davantage d’anticorps. C’est un résultat objectif et mesurable.
La méditation sur le souffle fait partie d’un vaste programme destiné à atteindre l’éveil complet d’un bouddha, alors que la méditation de pleine conscience est plutôt utilisable pour améliorer la santé du corps dans le temps présent.
Il ne s’agit pas de remplacer l’une par l’autre. Mais il me semble que les bouddhistes malades, et j’ai remarqué qu’il y en a, pourraient peut-être améliorer leur santé en pratiquant tous les jours 20 minutes de méditation de pleine conscience, en tout cas c’est une évidence scientifique. Sans pour autant modifier leur pratique du dharma.
Je crois bien que ce que de nos jours on appelle "la pleine conscience" ressemble étrangement à des méditations millénaires appelées les 4 attentions : au corps, aux sensations, à l'esprit (conscience), aux objets mentaux. :-) Cf. Satipatthana Sutta
Aux éditions Marabout, dans son livre intitulé : "Les Quatre Fondements de la pleine conscience - Aux sources de la pratique de l'attention", le Vénérable Henepola Gunaratana abonde dans votre sens, Anilag, puisque les chapitres principaux de son ouvrage se réfèrent à la pleine conscience : 1) du corps 2) des ressentis 3) de l'esprit 4) des dhammas.
Autre chose : dans l'un de ses enseignements en français sur Internet ( https://vimeo.com/20674925 / https://www.youtube.com/watch?v=PnDUECjIzSE), Thich Nhat Hahn s'explique lui-même sur cette expression de "la pleine conscience". En voici l'extrait concerné : Le mot sanskrit smrti « mémoire/souvenir » & en pali sati « attention » signifie la « pleine conscience ». C’est moi qui ai utilisé l’expression « pleine conscience » pour traduire ça. Avant, moi, on utilisait le mot « attention », mais je pense que pleine conscience est la meilleure expression pour traduire sati / smrti.
Smrti est le nom sanskrit du facteur mental déterminant (plus littéralement "à objet déterminé") "la mémoire" - mais bien sûr au sens bouddhique du terme, en tant que fonction de l'esprit qui maintient présent à l'esprit un objet connu.
Toute méditation (analytique ou concentration) requiert l'emploi continu de smrti/mémoire, et l'utilisation ponctuelle de la vigilance.
En d'autres termes, toute méditation bouddhiste suppose d'être effectuée "en pleine conscience". :-) Pas de mémoire/pleine conscience, pas de méditation...
Au fond, l'expression "méditation en pleine conscience" serait peut-être plus appropriée (et moins ambiguë) que "méditation de pleine conscience", en tout cas pour des personnes qui ne pratiquent pas le Chan/Zen.
En effet, cette terminologie a été établie par le Vénérable Thich Nhat Hahn, lequel est de tradition Zen Linji (Rinzai en japonais). Il est possible/probable que dans cette tradition, il s'agisse effectivement de "méditation de pleine conscience", et pas seulement en pleine conscience (sous-entendu en portant sur un autre objet).
Depuis plusieurs années, des études scientifiques ont démontré les effets positifs sur la santé de la méditation de pleine conscience : amélioration des défenses immunitaires, augmentation de la densité de matière grise dans le cerveau, importante réduction du nombre de jours d’arrêt maladie, les rhumes durent moins longtemps, les télomères se dégradent moins vite, les maladies de peau guérissent plus vite, amélioration de la santé cardio-vasculaire, etc.
RépondreSupprimerCes expériences ont été menées avec des méthodes scientifiques : utilisation de groupes témoin, mesures biologiques et imagerie médicale, etc.
Ceci dit il n’est pas certain que les bouddhistes profitent entièrement de ces bienfaits : en effet ces protocoles scientifiques utilisent la méditation de pleine conscience. Or la méditation de pleine conscience est davantage que la méditation sur le souffle, ce n’est pas de la méditation analytique, et ce n’est pas la méditation avec concentration utilisée par les pratiquants du lamrim.
La méditation de pleine conscience consiste à prêter attention à l’expérience vécue sans filtres. On accepte ce qui vient des 6 sens (par exemple tous les sons que d’habitude on ignore), les pensées, les états émotionnels, les signaux envoyés par le corps même s’ils sont déplaisants, les douleurs sans essayer de les repousser (ce n’est pas de la relaxation), sans analyser, sans juger, sans rien attendre.
J’ai l’impression que les bouddhistes font appel à d’autres types de méditation avec un but de progrès spirituel, mais qui ne sont peut-être pas aussi efficaces que la méditation de pleine conscience au niveau de la santé du corps.
Il se peut donc que même les bouddhistes puissent tirer parti d’un entraînement à la méditation de pleine conscience, non pas dans un but d’amélioration spirituelle qui est déjà l’objet de leur pratique, mais avec l’intention d’améliorer leur santé.
J'ai tendance à penser que, en dépit de l'absence d'expériences scientifiques à propos des méditations autres que la pleine conscience, elles ont néanmoins des effets positifs. Il est de notoriété publique en Inde et au Tibet que la respiration sur le souffle est bonne pour la santé, même si ce n'est qu'un effet secondaire et certainement pas le but principal. Cela s'explique entre autres par l'interdépendance entre nos différents plans.
RépondreSupprimerLes biographies de maîtres et pratiquants du passé abondent en exemples, certes empiriques. :-)
Il y a quelques années, j'ai eu l'occasion d'être présente d'expériences dites scientifiques (en tant qu'interprète, le cobaye étant le moine tibétain que j'accompagnais), et j'en suis sortie quelque peu sceptique...
Il me semble d'ailleurs que certains scientifiques admettent que le fait même d'observer un phénomène le transforme.
A mon avis, en tant que bouddhiste, utiliser une technique de méditation uniquement pour améliorer la santé serait insuffisant (et regrettable), car en ce cas il ne pourrait pas s'agir d'une pratique du Dharma. Il vaudrait mieux y ajouter un objectif de plus longue portée.
La méditation sur le souffle a beaucoup de vertus : elle permet de développer l’intention, l’attention, la concentration, elle permet de discipliner les pensées et elle est un antidote à la distraction, la dispersion et la paresse. C’est un élément essentiel de la voie bouddhique et je ne remets pas en cause son intérêt.
RépondreSupprimerMais en concentrant l’attention sur le souffle, les autres perceptions du corps sont gommées, alors que la méditation de pleine conscience ouvre toutes les portes des perceptions. Par exemple elle permet d’entendre toutes sortes de bruits qui d’habitude ne sont pas perçus tels que les bruits de vêtements, les bruits de notre corps, les milliers de bruits du monde extérieur. Il existe un exercice de pleine conscience qui consiste à « scanner » le corps, c’est à dire à porter notre attention sur toutes les parties du corps, les unes après les autres, ce qui permet de recevoir toutes sortes de messages, sensations ou petites douleurs qui d’habitude sont ignorées.
L’attitude la plus courante face aux sensations déplaisantes consiste à les ignorer, à tenter de les supprimer. Mais ce faisant nous privons notre cerveau d’informations essentielles. Le corps est capable de se réparer lui-même, mais encore faut-il qu’il puisse poser un diagnostic et pour cela il a besoin d’un maximum d’informations. Lorsque nous gommons les sensations et petites douleurs, le corps ne sait plus qu’il y a là quelque chose à corriger. C’est peut-être pour cela que la méditation de pleine conscience améliore la santé. (Ce que je dis-là est mon ressenti personnel et je n’ai pas de preuves de ce que j’avance).
En tout cas les protocoles scientifiques me semblent fiables : par exemple on injecte le vaccin contre la grippe à deux groupes, un qui médite 20 minutes par jours et un autre qui ne médite pas. Quelques semaines après, le groupe de méditants a développé davantage d’anticorps. C’est un résultat objectif et mesurable.
La méditation sur le souffle fait partie d’un vaste programme destiné à atteindre l’éveil complet d’un bouddha, alors que la méditation de pleine conscience est plutôt utilisable pour améliorer la santé du corps dans le temps présent.
Il ne s’agit pas de remplacer l’une par l’autre. Mais il me semble que les bouddhistes malades, et j’ai remarqué qu’il y en a, pourraient peut-être améliorer leur santé en pratiquant tous les jours 20 minutes de méditation de pleine conscience, en tout cas c’est une évidence scientifique. Sans pour autant modifier leur pratique du dharma.
Je crois bien que ce que de nos jours on appelle "la pleine conscience" ressemble étrangement à des méditations millénaires appelées les 4 attentions : au corps, aux sensations, à l'esprit (conscience), aux objets mentaux. :-) Cf. Satipatthana Sutta
RépondreSupprimerAux éditions Marabout, dans son livre intitulé : "Les Quatre Fondements de la pleine conscience - Aux sources de la pratique de l'attention", le Vénérable Henepola Gunaratana abonde dans votre sens, Anilag, puisque les chapitres principaux de son ouvrage se réfèrent à la pleine conscience : 1) du corps 2) des ressentis 3) de l'esprit 4) des dhammas.
SupprimerEt évidemment, Vénérable Henepola Gutaratana se fonde sur le Satipatthana Sutta !
RépondreSupprimerAutre chose : dans l'un de ses enseignements en français sur Internet ( https://vimeo.com/20674925 / https://www.youtube.com/watch?v=PnDUECjIzSE), Thich Nhat Hahn s'explique lui-même sur cette expression de "la pleine conscience".
RépondreSupprimerEn voici l'extrait concerné :
Le mot sanskrit smrti « mémoire/souvenir » & en pali sati « attention » signifie la « pleine conscience ». C’est moi qui ai utilisé l’expression « pleine conscience » pour traduire ça. Avant, moi, on utilisait le mot « attention », mais je pense que pleine conscience est la meilleure expression pour traduire sati / smrti.
Eh oui. :-)
RépondreSupprimerSmrti est le nom sanskrit du facteur mental déterminant (plus littéralement "à objet déterminé") "la mémoire" - mais bien sûr au sens bouddhique du terme, en tant que fonction de l'esprit qui maintient présent à l'esprit un objet connu.
Toute méditation (analytique ou concentration) requiert l'emploi continu de smrti/mémoire, et l'utilisation ponctuelle de la vigilance.
En d'autres termes, toute méditation bouddhiste suppose d'être effectuée "en pleine conscience". :-)
Pas de mémoire/pleine conscience, pas de méditation...
Au fond, l'expression "méditation en pleine conscience" serait peut-être plus appropriée (et moins ambiguë) que "méditation de pleine conscience", en tout cas pour des personnes qui ne pratiquent pas le Chan/Zen.
RépondreSupprimerEn effet, cette terminologie a été établie par le Vénérable Thich Nhat Hahn, lequel est de tradition Zen Linji (Rinzai en japonais). Il est possible/probable que dans cette tradition, il s'agisse effectivement de "méditation de pleine conscience", et pas seulement en pleine conscience (sous-entendu en portant sur un autre objet).