Les moines birmans tentent d'aider les rescapés de Nargis
AFP - jeudi 15 mai 2008 - il y a 1 heure 1 minute
KYI BUI KHA, Birmanie - Les moines bouddhistes, qui ont conduit les manifestations pro-démocratie contre la junte birmane en septembre, tentent d'aider les rescapés du cyclone Nargis avec de la nourriture, des abris et un réconfort spirituel, mais les autorités entravent leurs efforts alors même qu'elles ne fournissent pas une assistance adéquate aux sinistrés.
Le régime birman a fixé une date limite à certains monastères pour qu'ils fassent partir les rescapés qui s'y sont réfugiés, dont beaucoup ont perdu leur maison dans la catastrophe, expliquent les moines et des survivants.
"Il n'y a pas d'aide. Nous n'avons vu personne du gouvernement", déclare U Pinyatale, 45 ans, moine du monastère de Kyi Bui Kha, dans le delta de l'Irrawaddy, qui partage ses stocks de riz presque épuisés et de l'eau de pluie avec une centaine de villageois sans abri.
On observe des scènes similaires dans d'autres zones du delta et à Rangoon, la plus grande ville du pays, où les monastères sont devenus des lieux de refuge suite au passage de Nargis le 3 mai et au manque de réaction du régime pour venir en aide aux sinistrés.
"Par le passé, je faisais des dons aux moines. Mais aujourd'hui c'est le contraire, ce sont les moines qui nous aident", souligne Aung Khaw, un ouvrier en bâtiment de 38 ans qui a emmené son épouse et sa fille dans un monastère de Hlaingtharyar, dans la banlieue de Rangoon, après le passage du cyclone, qui a détruit sa maison en bambous.
Un des moines du monastère raconte avoir tenté de discuter avec les militaires, qui ont ordonné à la centaines de réfugiés présents sur le site de partir. "Je ne sais pas où ils vont aller", ajoute-t-il sous couvert de l'anonymat par crainte de représailles.
Il semble que les ordres d'évacuation des monastères sont donnés de manière sélective. Certains monastères de Rangoon ont été priés de faire partir les victimes du cyclone dans les prochains jours, selon les moines. Dans le delta, les réfugiés ont été autorisés à y rester ou ont été informés qu'ils pouvaient venir y chercher des fournitures, mais pas s'y abriter.
Les autorités "ne veulent pas qu'un trop grand nombre de personnes se regroupent dans des petites villes", selon Hla Khay, un opérateur de bateaux dans le delta. Elles sont "préoccupées par la sécurité. S'il y a beaucoup de personnes frustrées ensemble, il pourrait y avoir un nouveau soulèvement."
Les plus grands monastères sont étroitement surveillés. Le régime semble craindre une réédition des manifestations pro-démocratie conduites par les moines en septembre dernier et réprimées dans le sang. Au moins 30 personnes auraient été tuées, mais selon les organisations de défense des droits de l'homme le bilan de la répression serait beaucoup plus élevé.
Un nombre indéterminé de moines sont toujours en prison et d'autres qui ont fui leur monastère par crainte d'être arrêtés ne sont toujours pas revenus. "Après les manifestations de septembre, le gouvernement a peur que les gens vivent avec les moines dans les monastères. Les moines pourraient les convaincre de participer à de nouvelles manifestations", déclare un dentiste de Rangoon sous couvert de l'anonymat.
La presse a reçu l'ordre de ne pas publier d'articles sur l'aide apportée par les moines aux rescapés et les autorités ont également interdit à au moins un monastère et un couvent à Rangoon d'accepter des fournitures d'organisations humanitaires.
"Le gouvernement excerce un grand contrôle", précise U Pinyatale, du monastère de Kyi Bui Kha. "Ceux qui veulent donner directement aux victimes ont des ennuis. Ils doivent donner au gouvernement ou le faire en secret."
Il ne reste plus que dix sacs de riz dans son monastère, précise-t-il. De quoi tenir jusqu'à la fin de la semaine. "Nous devrons trouver un moyen de trouver plus de nourriture", dit-il.
Selon U Pinyatale, la vingtaine de moines et de nonnes du sanctuaire tentent également d'apporter un réconfort spirituel aux habitants du village de Kyi Bui Kha, où 90 maisons sur 120 ont été totalement détruites et où de nombreux cadavres ont été découverts après le cyclone. "Nous prions avec eux." AFP
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