Une amie (ah les amis !) m'a posé une colle : quelles seraient les nuances entre la fatigue, la paresse et la torpeur...
Qu'en pensez- vous ?
En ce qui me concerne, j'aurais envie de répondre "Jocker", mais courage, essayons de creuser la question.
Pour commencer par le plus facile, 1. Paresse et torpeur figurent au nombre des 51 facteurs mentaux recensés par Asanga, au sein des "facteurs perturbateurs secondaires". La fatigue, nenni.
2. La torpeur comporte une impression de lourdeur, physique comme mentale ; pas la paresse, en tout cas pas forcément, notamment quand il s'agit d'énergie mal orientée*.
Ceci dit, Rinpoche nous a rappelé ce week end que tout klesha se manifestant ouvertement est flanqué d'une escorte d'au moins six autres klesha : obscurité mentale (ignorance), laisser-aller, non-foi, paresse, dispersion ainsi que ... torpeur. Sans oublier, j'imagine, l'absence de honte et de gêne.
3. Les fonctions respectives de la torpeur et de la paresse se marient sans doute très bien, mais ne sont pas strictement identiques : - étayer tous les autres facteurs perturbateurs pour l'une, empêcher de s'engager dans des activités valables, bénéfiques, pour l'autre.
4. Venons-en quand même à la fatigue...
Selon l'Abhidharamasamuccaya, elle serait de l'ordre du toucher, si je ne m'abuse, et donc relèverait de la catégorie de la forme.
D'un autre côté, qui a développé la qualité de l'enthousiasme ne ressent plus de fatigue... Or, l'opposé de l'enthousiasme est ... la paresse.
Du côté des sensations allant de pair avec elle, je suppose qu'il s'agira plutôt de sensations désagréables, résultats à pleine maturité de karma non vertueux - en dépit de l'expression "bonne fatigue". D'après ma expérience, la paresse quant à elle (sur le moment tout au moins) accepte volontiers des sensations certes souillées mais bien agréables nonobstant (Cf. moments de farniente, etc.).
Mais il y a aussi l'emploi de fatigue au sens de lassitude ou de dégoût envers, par exemple, le samsara : une telle fatigue serait éminemment bonne et vertueuse. Dommage qu'elle soit si rare...
Tout bien réfléchi, merci infiniment à S. d'avoir soulevé la question.
* Selon le bouddhisme, la paresse peut se présenter sous trois formes : - fainéantise ; - découragement ; - énergie déployée en des activités mauvaises (c'est-à-dire soit carrément négatives, soit superflues).
Peut-être que l'on peut aussi parler de la fatigue qui vient du manque de sommeil ou de repos. Fatigue qui serait différente de celle plutôt reliée à la lourdeure physique de la torpeur, bien que l'un puisse entrainer l'autre.
RépondreSupprimerJe pense que l'on peut aussi distinguer fatigue physique et fatigue mentale, bien que là aussi les deux restent assés dépendants (mais, par exemple, j'immagine bien qu'un pratiquant avancé puisse avoir déja bien affaiblit la torpeur et sache conserver longtemps la clarté et vivacité de son esprit alors même que son corps subit une forte fatigue, par exemple du fait d'une maladie).
Quand à la fatigue qui relève de la forme "du côté du toucher", sensation désagréable et donc résultat d'un karma non-vertueu, cela me fait penser, d'une façon générale, que ressentir ce genre de fatigue est directement lié à notre condition particulière de renaissance avec des agrégats souillés qui fait que l'on se retrouve à avoir besoin d'un minimum de sommeil (certains animaux ont besoin de bien plus de sommeil que nous , et certains dieux n'en n'ont pas besoin du tout, à ce qui parait...)
Quand à la torpeur qui accompagnerait systématiquement toute manifestation de facteurs perturbateurs, je reste perplexe. Car si j'ai bien compris, lorsque l'on réalise le calme mental, la torpeur devrait être éliminée (totalement ?),pourtant des facteurs perturbateurs peuvent encore se manifester. Il faudrait préciser ce point, svp.
Et puis, en ce qui me concerne, je me vois bien accomplir des activités inutiles imprégnées de divers facteurs perturbateurs avec absulument aucune lourdeur physique apparente, bien au contraire !
Peut-être il faudrait préciser un peu plus ce qu'est la torpeur...
De toute fdaçon, une chose est certaine : les facteurs perturbateurs (ou émotions perturbatrices),à la longue,c'est ...fatiguant!
Ivan.